Du Développement personnel
au développement essentiel
Il existe deux formes de développement: un développement essentiel un développement personnel. Le développement essentiel consiste à « s'aimer très fort » et le développement personnel à savoir exactement ce que l'on veut. Quand on définit ses objectifs, on sort de la souffrance.
Sans objectifs, notre vie ondulera comme une vague, sans aucune direction, de manière anarchique, dirigée par les seuls stimuli extérieurs. Le manque d'objectifs est en relation étroite avec la souffrance. Or l'intention d'un véritable travail interne est de séparer l'individu de l'idée même de souffrance; toute la difficulté est d'arriver à définir ce que l'on veut.
Développement essentiel et développement personnel vont de pair.
S’aimer très fort
La première clef du développement essentiel est de « s'aimer très fort ». Il s'agit d'un sentiment, d'une sensation.
L'écueil, en général, est que l'on tombe dans le « mysticisme », la « religiosité» ou les choses dites « transcendantales »; on essaie d'atteindre un but tout à fait vaseux et on ne comprend toujours pas que le problème se situe ailleurs. Aussi faisons une chose très simple, commençons par éliminer tout ce qui est supérieur. Faisons une croix sur le « centre émotionnel supérieur ».
Disons simplement: il existe un « centre émotionnel» car de cela nous
sommes sûrs. La difficulté est que nous n'avons aucun contrôle sur lui.
Lorsqu'il est parfaitement équilibré, tout devient possible. Quelque chose commence alors à se constituer en soi;
c'est ce que l'on appelle un « centre de gravité », quelque chose de stable, qui ne bougera plus, quoi qu'il arrive. Lorsque ce centre de gravité est créé, les problèmes disparaissent; on devient maître de la situation. Ensuite on est libre.
Les projections
Pour s'aimer très fort, il faut sortir des « projections ». Si l'on va au cinéma et que le film nous a plu, on se dit:
«j'ai aimé ce film »; c'est une sensation. Le problème est que cette sensation est toujours en projection, c'est-à-dire qu'elle nécessite un support, elle n'existe pas par elle-même. C'est, en quelque sorte, une charge que nous mettons sur l'objet. Aussi, enlevons ce support. Notre vie va ainsi devenir extrêmement riche et ne va plus dépendre de quoi que ce soit. Elle va être très riche parce que chaque instant que l'on vit, chaque chose, même les petites sensations, nous allons pouvoir nous en servir; même le simple fait d'aller au cinéma. Quand nous éprouvons cette « sensation », nous devenons maîtres de notre destin, nous commençons à créer notre vie, à devenir véritablement créateur. Nous arrivons à ce que l'on peut appeler: « créer son propre destin » et ce ne sont plus de simples mots. C'est le processus alchimique: forger, inventer, créer. C'est-à-dire commencer à inventer sa vie. Il s'agit ici d'une analogie, l'alchimiste étant celui qui, justement, peut transformer la matière, transformer le plomb en or. Il est le créateur par excellence.
La même chose peut être réalisée dans notre vie, sans plomb, sans or, sans rien: juste « nous mêmes ».
Les charges émotionnelles
Généralement, nous vivons en projection parce que nos objectifs ne sont pas clairs. Par exemple, si la personne que l'on aime cesse de nous aimer, nous devenons malheureux, affligés, parce que nous avons mis sur elle une certaine charge et que nous attendions beaucoup d'elle. Et si la personne ne répond pas à cette attente, à cette charge que nous lui avons accolée, nous sommes malheureux. Par contre, s'il n'y a plus de charge, il n'y a plus de problème. Habituellement, nous mettons énormément de charge sur les autres, aussi attendons-nous beaucoup d'eux. La seule façon d'être libre est de sortir des projections. Il n'existe pas d’autre liberté, ou alors des libertés relatives. Si l’on peut s'en contenter, c'est parfait! Mais si nous parlons d'une véritable liberté, il s'agit d'une autre exigence.
Se remplir soi-même
Ne plus dépendre de personne, que de soi-même. Que personne n'ait plus aucun pouvoir sur nous. Commencer par se remplir soi-même, au lieu d'être toujours rempli par l'extérieur, c'est le but. Cela veut dire combler ses manques sans le besoin des autres.
N'avoir plus de manques. Etre en création permanente. Etre le créateur par excellence. Si l'on est Mozart, on compose, si nous nous sentons des dispositions pour dormir, nous dormons. Sans aucune obligation. Sans culpabilité aucune! Sortir totalement de la culpabilité.
La culpabilité
La culpabilité est quelque chose de très simple à comprendre. Lorsqu'on vit dans un contexte social et qu'on sort de ce contexte, apparaît la culpabilité. Il Y a des personnes qui, sous prétexte de préserver leur individualité, sont en désaccord avec le social, et par conséquent se trouvent en état de culpabilité. Le jour où on est en accord avec le social et que, dans le même temps, on est suffisamment fort pour préserver son individualité, la culpabilité disparaît.
Etre totalement responsable de sa vie
La vie est très simple: définir ses objectifs, et c'est terminé. Mais pour cela, il faut être extrêmement déterminé! Prendre sa vie en main et en être totalement responsable; qu'on ne puisse pas dire: « Ah! Mon passé a été comme ceci ou comme cela: c'est le destin! » Non! Au contraire: « Je ne crois plus à cette sorte de destin mais à mon destin ». Peu de personnes se rendent compte que toute notre vie passé, présent, futur - est exactement ce que nous en avons fait; que le futur n'est pas un futur qui dépend des circonstances extérieures, des événements, mais de notre propre imagination. Toutes les erreurs faites précédemment, c'est nous qui les avons faites. Tout ce que l'on fait, c'est nous qui le faisons. Notre passé, nous l'avons construit, et le futur, par conséquent, c'est nous qui le décidons.
Nous devenons entièrement responsables de notre vie. Dans ce type de travail, il y a toujours la porte ouverte à la liberté de l'individu. « C'est moi qui développe ma vie et vis la vie que je décide de vivre. »
Goûter la vie
Pour que nous puissions arriver à nous aimer, il nous faut éprouver du plaisir, goûter la vie. Parce qu'il y a beaucoup de raisons d'être vraiment heureux et de vivre content. On ne doit pas avoir peur d'imaginer une bonne vie avec de bonnes choses. Si on n'imagine pas cela, on risque d'attirer autour de soi des choses moins agréables. Certaines personnes se sont interdites un plaisir, pour telle ou telle raison, en relation avec leur père, leur mère, etc.
Nous avons des besoins dans notre vie, et rien ne s'oppose à leur réalisation, excepté, probablement, nous-mêmes.
Lorsqu'on s'aime soi-même, on éprouve du plaisir, on se sent heureux dans la fréquentation de soi.
En réalité, les choses sont simples, mais la vérité est que nous sommes compliqués. Nous méritons tout, mais si nous ne définissons pas nos objectifs, nous ne pouvons rien mériter.
C'est normal! N'ayons pas peur de ne pas réaliser un objectif. Si on ne l'atteint pas, on en prépare un autre. Si nous ne préparons rien, la souffrance sera toujours là. Définir ses objectifs est quelque chose de totalement fictif.
Plus c'est fictif, plus ce sera efficace et plus ça nous portera.
Auto-validation
Au lieu d'arriver à une « auto-observation », travail intellectuel aboutissant à une analyse et ensuite à l'inhibition, celle-ci conduisant indubitablement à la souffrance, nous préférons parler d'« auto-validation ». L'analyse conduit inévitablement à un excès d'auto-critique; c'est la raison pour laquelle l'auto-observation n'est pas bonne. Fatalement va apparaître un « censeur ». C'est pour lui échapper qu'il faut s'auto-valider.
L'auto-observation s'adresse à la tête, tandis que l'auto-validation fait appel au cœur. Alors, sans rien toucher, au-lieu de « s'auto-observer », nous nous « auto-validons »: nous nous affirmons.
Créer son propre destin
L'objectif final de ce travail est d'arriver à: un, créer son propre destin;
deux, atteindre un bien-être qui ne dépend plus de rien. Apprendre à se remplir soi-même. Là est la clé. L'auto-validation est le moyen donné au départ pour pouvoir y parvenir. Nous ne pourrons pas atteindre l'état de bonheur si nous n'arrivons déjà pas un peu à nous aimer, c'est impossible. Et ensuite apprendre à savoir exactement ce que l'on veut. Quand on sait ce que l'on veut, les problèmes disparaissent.
Parce que les problèmes n'existent pas; en réalité, il n'y a que des solutions. Malheureusement, découvrir que nos problèmes ne sont qu'illusion est assez douloureux. Eh oui! C'est le paradoxe! En fait, il s'agit simplement de remettre les choses à leur place.
Cela peut paraître provocateur, mais dans le véritable sens: éveiller quelque chose chez l'autre.
Confiance en soi
En réalité tout est extrêmement simple: c'est nous qui sommes compliqués. La vérité est que nous ne nous faisons pas confiance. Comment peut-on se faire confiance? Par la décision.
Je décide que, momentanément, tout pourrait, marcher différemment, qu'il existerait une autre possibilité; provisoirement, c'est la pensée qui indique l'action. Le propre de la pensée, c'est d'avoir peur, mais elle décide de se faire confiance.
Il est normal qu'il en soit ainsi puisque personne ne nous a jamais fait confiance dans notre vie; qu'en conséquence des peurs se sont instaurées.
Alors, malgré tout, on décide de faire avec, parce qu'on se dit que, sans doute, quelque chose d'autre peut apparaître. Mais pour cela, encore faut-il vouloir jouer le jeu. Si on ne le décide pas, il ne se passera jamais rien: parce que personne ne pourra le faire à notre place. Jamais!
En prenant confiance en soi, on découvre que l'on recèle au plus profond de soi un potentiel tellement énorme qu'une fois qu'on y a vraiment goûté on ne peut plus revenir en arrière. Finalement, on ne peut qu'avoir confiance en soi!
Charles Antoni
Génération Tao n° 37 - été 2005
Photo: Martin Quinn, Moving rock